Jesse Eisenberg
Deauville Talent Award - 48e Festival du Cinéma Américain de Deauville
Avec plus de rôles que d’années au compteur de la vie, Jesse Eisenberg ("montagne d’acier" littéralement) est aujourd’hui au sommet d’une carrière exceptionnelle dans le paysage du cinéma américain. En trente-huit ans, cet acteur hyperactif également metteur en scène, auteur, journaliste… n’aura eu de cesse de se transformer, et d’aller puiser une vérité enfouie et complexe au fond de ses personnages et confronter le mal et le mâle qui se nichent en eux.
Fort d’une élocution en mode staccato permanent, son ironie toujours latente, son mélange de vulnérabilité et de nervosité, d’hésitation et de précipitation, de mutisme et de logorrhée, il s’aventure au vertige de ses rôles avec le talent d’un caméléon. Corps-machine et raide sous le regard de David Fincher dans la peau de Mark Zuckerberg dans "The Social Network" en 2010, où il livre une interprétation exceptionnelle (le film est couronné de huit nominations aux Oscars, dont celui du meilleur acteur pour Jesse Eisenberg), corps mou d’adolescent super-héros fumeur de joints dans la comédie d’action "American Ultra" de Nima Nourizadeh, il devient aussi pur corps et silence quand il se glisse dans la peau de Marcel Marceau ("Résistance" de Jonathan Jakubowicz présenté à Deauville en 2020), lui qui avait fait de son débit de voix en cascade sa marque de fabrique.
Jesse Eisenberg a le talent du corps et de l’esprit, du travail aussi : il s’immerge neuf mois dans la communauté ultra-orthodoxe pour préparer son rôle dans "Jewish Connection" de Kevin Asch, présenté en compétition à Deauville en 2010, apprend le mime pour devenir Marceau, et Dieu seul sait comment il aura su devenir le troublant double de Woody Allen. L’admiration sans doute pour un maître dont il loue la liberté et l’humour. Il n’a de cesse que de se défier des cases où l’on voudrait l’enfermer : celui du juif new-yorkais ou de l’ado névrosé que l’on aura croisé chez Noah Baumbach ("Les Berkman se séparent") ou Gregg Mottola ("Adventureland : Un job d’été à éviter") : il sera tour à tour prestidigitateur de génie chez Louis Leterrier ("Insaisissables"), aux côtés de géants comme Morgan Freeman, Woody Harrelson ou Mark Ruffalo, icône de la pop culture dans "Batman v Superman : L’Aube de la justice", le blockbuster de Zack Snyder, ou encore homme ordinaire pris dans le cauchemar d’une mystérieuse réalité dans "Vivarium" de Lorcan Finnegan.
Il signe cette année son premier film en tant que réalisateur avec "When you Finish Saving the World", dans lequel il interroge tant la modernité d’une jeunesse perdue dans l’influence et la célébrité que le militantisme devenu aveugle d’une autre génération. Le film, tourné en pellicule, sera projeté en avant-première et en sa présence au festival.
Jesse Eisenberg recevra un Deauville Talent Award qui saluera le talent d’un acteur qui incarne les multiples facettes d’une Amérique que son intranquillité dérange et interroge.